Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

La mort de Smaug, selon Peter Jackson

Publié le par itikar

Attention au spoiler, ce court récit dévoile un pan important de l'intrigue du dernier film de PEter Jackson "Le Hobbit : la bataille des cinq armées", bientôt en salle et que j'ai pu voir en avant première.

 

 

Le dragon traçait une à une, méticuleusement et avec une furieuse assurance, des lignes de feu sur la carte d'Esgaroth qu'il redessinait ainsi à même le ciel.
De sa cellule, Bard l'archer ne pouvait qu'observer, impuissant, depuis son soupirail muni de barres en acier, la fin de son village, dans un tintamarre de peur et de cris.
Ici et là, il voyait les conséquences de la rage de Smaug qui se multipliaient : là, une maison s'écroulant sous les ravages de ses flammes, ici une grappe de fuyards malheureux fauchée par un jet de feu ... Bard avait la rage, lui aussi, ainsi enfermé alors qu'il savait ses propres enfants en danger, comme tout son peuple impuissant face au désastre. Mais Bard n’était pas un homme ordinaire. Tant qu'il sentira de la vie en lui, il se battra, même dans un fol espoir.Qui, dans la ville du lac, aurait pu prétendre en dire autant ? Certainement pas Alfrid et le Maire, qui venait de s'affairer avec une vitesse confondante, à remplir une barge à ras bord d'or, jusqu'à ne plus pouvoir rien contenir d'autres, et surtout pas les quelques malheureux pensant là voir leur planche de salut et cherchant, au dépens de quelques sacs d'or tombant par-dessus bord, à monter à leurs côtés. Alfrid faisait donc méticuleusement le ménage : si la main quémandeuse d'une vielle femme s'aventurait à vouloir monter, il lui saisissait le poignet, comme pour l'aider, avant de la repousser dans l'eau où brûlait de plus en plus de flammes. Tout cela devant un Maître effrayé mais déterminé à ne sauver que l'or ... et lui. Alors, le paysage autour d'eux n'était plus que mort et flamme, avec de temps en temps le sillon de Smaug occupant toute une rue où il plongeait à pleine vitesse en soufflant encore un peu plus de désolation, avant de remonter dans le ciel pour reprendre une inspiration et fondre et souffler à nouveau sur sa prochaine cible.

Ainsi, le Maître, son valet et leur fortune se frayait un passage dans les canaux brûlants entre deux incinérations spectaculaires de gens et de bâtiments. Le Maître, tenant le gouvernail, regardait l'or tombé à l'eau à chaque soubresaut causé par Alfrid repoussant quelque désespéré. Puis, il regardait Alfrid, puis l'or qui tombait. Là, il se désola :"Mon or, non... Alfrid, il tombe à l'eau. Alfrid, non, rien est plus précieux que mon or."

Son serviteur se retourna alors vers lui quelque peu tout en vérifiant qu'il n'y avait aucune tentative d'investiture de leur barge, et lui répondit "seigneur, c'est que nous sommes trop lourds ..." Le maître acquiesce et pousse violemment Alfrid à l'eau au moment même où son navire passe sous la prison dans laquelle est enfermée Bard. Alors, les événements s’accélèrent : l'archer avait entre temps noué entre eux une longue corde en chanvre qu'il passa entre les barreaux après l'avoir transformé en nœud coulant,  et il put ainsi non sans adresse agripper et serrer le gouvernail du bateau, ce qui accidentellement étrangla en même temps le Maître de Lacville qui le manœuvrait. Le gros homme se retrouva enlacé par le col à la pièce de bois. Il agonisait mais, en même temps, filant dans le courant, le bateau tirait le soupirail de la cellule de Bard. Entre le cou du Maître maintenu ainsi contre le gouvernail, et les barreaux de la pièce, ce furent les barreaux qui cédèrent, perçant un trou dans la toiture, et libérant l'archer, tout en poussant le Maître au milieu de son bâteau, qui perdit encore un peu plus d'or.

Bard fut bientôt dehors, arrachant une portion du toit de la bâtisse non sans avoir entre temps récupéré dans la pièce adjacente à sa cellule son arc et son carquois avec lequel il taquina bientôt l'armure externe de Smaug, qui sentait chaque flèche rebondir sur son cuir et n'avait cure de telles insignifiantes piqures.

Bard avisa une tour en bois, la plus haute de la ville, et désormais la seule encore debout. Tout Esgaroth brûlait, chaque rue, chaque maison, chaque ponton, et seuls certains toits y menant étaient encore depuis sa position peu stratégique praticables. Smaug continuait de souffler, ajoutant des flammes aux flammes, dans la panique et les cris ardents des habitants de la ville du lac qui n'était plus qu'un feu de paille ou presque. C'est en sautant de toiture en toiture, prestement mais au prix de quantité d'efforts, que l'homme parvint enfin au sommet. Il n'avait pas lâché son arc. Il le banda fortement, au moment même où Smaug plongeait vers lui. Il tira avant de recevoir son souffle deux ou trois flèches, qui ne purent percer les écailles du dragon. Le dragon souffla et le manqua de peu. La toiture de la tour était arrachée, et Bard vit Smaug du coin de l’œil le remarquer. A peine. Avant de continuer son travail annihilateur.

Heureusement pour Bard qui ravalait sa salive de dégoût en constatant à quel point il était désarmé face au colossal ver rouge et or qui anéantissait son peuple et désintégrait sa ville, une paire d'yeux avait suivi son escalade acharné. Ceux de son fils, Bain, qui était alors conduit en lieu sûr, avec ses deux petits sœurs, par l'elfe Tauriel et un groupe des nains venus dernièrement. Elle leur avait déniché une barge cachée sous le sol de leur maisonnette, alors même que les habitants paniquaient en fuyant le dragon qui les surplombait et commençait à les incendier. Bain avait vu son père qui s'élançait, et comprit qu'il avait besoin de la seule arme capable, disait la légende, de tuer le dragon : la dernière flèche noire de l'Arquelance, qu'il avait lui-même dissimulé lorsque son Bard le lui avait confié. Alors, n'écoutant que son courage, Bain quitta le bateau, et alla chercher ce trésor pour, au prix de milles dangers qu'on ne peut ici que deviner, apporter à point nommé la flèche à son père.  Pendant que celui-ci aidait finalement son fils à monter sur la plateforme de la tour du clocher, le grand ver atterrit au coin d'une rue, sa silhouette toute entourée de feu et de fumée. Son œil rouge fixait désormais, dans une superbe colère, l'homme et son rejeton, et il lui parla, de loin à quelques rues de lui :"Tu es le dernier debout encore ici. Penses-tu être de taille petite fourmi ?" ... "Je suis la mort et tu vas bientôt le constater à ton tour. Contemple ta fin !  ". Il prit son élan, et s'élança prodigieusement vers les deux survivants en ouvrant ses mâchoires en grand.

SmaugDestroyingLakeTown

Bard saisit la flèche noire que lui tendait in extremis son fils, et fit prendre calmement à ce dernier une posture bien droite face à lui, tout en lui demandant de le regarder et non pas le dragon qui arrivait sur eux pour le coup de grâce. Déterminé à tenter à abattre le monstre une dernière fois, Il avait rompu la corde de son arc, et calé les deux extrémités de celui-ci de part et d'autre de la plateforme du clocher sur lequel ils se tenaient, posant l'extrémité pointue et torsadée du long javelot sur les épaules de son fils ainé. Arque-bouté sur ses jambes, il mit son dos en arrière pour mieux bander l'arc improvisé sur lequel il tirait de tout son poids, augmentant ainsi d'autant la courbure. Bloquant la queue de la flèche noire entre ses doigts Il fixa le dragon qui n'était plus qu'à quelques mètres à hauteur d'eux, fusant dans l'air calciné, vu la faille son portail et demanda calmement à Bain de se décaler un peu sur la droite, alignant ainsi précisément la flèche noire avec sa cible, la seule zone sans écaille du poitrail de Smaug.

Il lâcha la corde.

La flèche noire s'enfonça sans soucis dans la poitrine du monstre, trouvant immédiatement son cœur. Dans un hoquet douloureux, la douleur fit vibrer tout son être, l'empêchant de refermer les mâchoires sur les humains qui venaient ainsi de le terrasser. Bientôt, il chercha le salut haut dans le ciel, le corps tordu par une onde de souffrance. La langue pendante et les yeux éclatés, le reptile ailé cessa très vite son vol, les ailes désorganisées, et comme une feuille morte titanesque, tomba en vrille vers le sol. Bientôt il y trouva la surface du lac, à la limite d'Esgaroth, qu'il heurta à l'endroit même où le Maître et son bateau se trouvait. Celui-ci vu la mort arrivé puis l'écraser.

Par une flèche hors du commun tirée par un homme qui ne l'était pas moins du pinacle d'Esgaroth, le titan ailé venait d'être abattu.

Commenter cet article